Transmettre, pour Dérézo, c’est l’acte de formation, de pédagogie, et peut-être d’éducation. C’est être « entre le secret arraché et la savoir délivré »*. Mais c’est aussi remettre en cause la pulsation, parfois interrompue, entre les générations, les idées ou les groupes.
Dans cette ronde de la passation sont en jeu quantité de représentations qui interpellent autant les élèves, les apprentis, les intervenants et les professeurs, que les politiques, les institutions, les parents ou les sociologues.
Qui apprend de qui ?
Et qu’apprend le professeur de l’élève ?
Dérézo, en assumant les questionnements parfois complexes d’être « entre » le professeur, l’élève et les parents d’élèves, veut organiser une intention d’émancipation. Un mouvement, centré sur le texte et la parole, le corps et la pensée, l’espace et le rythme, dans la mesure où ils sont produits pour l’écoute d’un auditoire. Ces entités canoniques du théâtre ne clôturent pas la représentation et ses avatars pour autant.
Vigilants à ce que le théâtre ne soit pas un but mais un outil, nous cultivons les strates qui tracent, entre pratique et théorie, les limites d’un atelier ou d’un stage. Par là nous voulons distinguer les enjeux qui différent de l’élève à l’apprenti, de l’apprenti au professionnel. Par là nous refusons l’instrumentalisation du théâtre.
En interne, pour nous former nous-même, nous organisons plusieurs fois par an des cessions de travail sous la direction de spécialistes : arts martiaux, danse, ingénierie, philosophie…
Transmettre c’est aussi partager notre art, nos recherches.
C’est remettre en perspectives notre présence, notre nécessité à y être, encore, au théâtre.
Par là nous aiguisons nos regards et fabriquons du lien.
Par là nous déplaçons nos idées, nos gestes artistiques, nos propositions, et nos spectacles s’en emplissent.
Parce que le monde est en révolution, nous jubilons avec lui, conscients que chaque époque à son art, conscient que nous sommes la passerelle au présent entre la représentation et la population, entre ceux d’hier et ceux de demain.
Transmettre c’est apprendre à mettre en marche une écoute particulière de soi, donc du monde, donc des autres.
*Georges Banu
